Spotlight, un film intéressant mais qui déçoit néanmoins

Spotlight est le nom de la cellule d’investigation du Boston Globe, qui révéla une importante affaire de prêtres pédophiles en l’an 2002.

PAR CHRISTIAN CAMPICHE

Publié par La radeau de la Méduse, journal en ligne suisse http://www.lameduse.ch/

 

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Spotlight est aussi le nom d’un long métrage qui cartonne dans les salles après avoir été encensé par les médias. Spotlight est un film intéressant parce qu’il remet au goût du jour l’enquête et le reportage, un genre que ces mêmes médias pratiquent de moins en moins, faute de moyens. Mais spotlight déçoit.

Du moins ce film a-t-il déçu l’auteur de ces lignes, un journaliste. Parce que fort peu de scènes montrent le rédacteur au cœur de son travail d’écriture, une activité qui constitue quand même l’essence de la presse écrite, par définition. Parmi les journalistes de la cellule Spotlight, qui a rédigé les papiers? Combien de temps ont-ils mis à le faire? Ont-ils passé des nuits blanches en séchant sur les termes, les expressions? Des avocats ont-ils relu leurs textes? Fraîchement débarqué d’un journal de Floride et de culture juive pleinement assumée dans le film, le rédacteur en chef  joue un rôle moteur dans la décision de lancer l’enquête. A-t-il signé un éditorial, et, si oui, de quelle consistance? Le film n’apporte pas de réponse à ces questions.

Tout au plus l’un des protagonistes lâche-t-il qu’il aimerait écrire un polar après l’éclatement de l’affaire. Comme si son besoin de s’exprimer dans un roman compensait une quelconque frustration journalistique. Le propre des professionnels déçus par le manque de moyens accordés au sein de leur rédaction. Mais certainement pas la caractéristique des membres de la cellule Spotlight qui ont eu des mois pour préparer leur enquête, un luxe dont personne n’oserait rêver sous nos latitudes.

Les acteurs parlent beaucoup, bougent beaucoup. A l’américaine. Comme dans la plupart des films du nouveau continent, les hyperactifs dominent la scène. Il y a peu de place pour la réflexion et l’analyse véritable. Le «vilain» est désigné d’emblée, la morale est sauve, mais que retient le spectateur, si ce n’est que l’Eglise catholique est composée de malades. Elle l’est quelque part, puisque plus de 6% des prélats semblent pratiquer la pédophilie. Pire, ils paraissent couverts par la hiérarchie. 6% est un chiffre énorme. A cause de ces pervers, des centaines de personnes ont souffert, certaines se sont suicidées. Au nom de la foi, ce qui est la pire des abominations.

Mais 6% ne constitue pas, et de loin, la majorité des prêtres. Comment se sentent ceux qui vivent leur sacerdoce dans le respect du prochain? Que dire des prêtres ouvriers, de ceux qui s’engagent courageusement dans les ghettos, les quartiers défavorisés, parfois au péril de leur existence. Ces personnes-là mériteraient aussi un film, à l’instar du documentaire réalisé en 1989 sur Monseigneur Romero, l’archevêque de San Salvador, assassiné en 1980. Alors Hollywood, à vos caméras!

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