Je me souviens , c’était l’hiver. Première heure de la matinée. Il était assis au premier rang , en face de moi. Ex abrupto il me dit:La vie est une merde, non? On se fait baiser la gueuler par « être » et « avoir ». Il faut faire .«
Lionel avait onze ans , il était en sixième et c’était l’hiver.
J’ai avalé ma salive, déstabilisée qu’il ait osé transgresser les normes du langage policé, digne des oreilles d’un prof!
Je lui ai demandé de rester à la fin de l’heure. Fallait bien faire un arrêt sur ces paroles là!
Et il est resté.
Je lui ai dit que j’étais d’accord avec lui et aussi, combien ses paroles d’enfant m’étonnaient. Qu’il ne faudrait jamais qu’il les oublie.
J’ai parlé de paroles-phare .
Il a souri.
Je m’en souviens.
Humainement c’est épatant et pour le reste …
- Adèle Mottet est semeuse d’espoir dans les champs lexicaux de l’Education nationale
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