
Par Lionel Chiuch
J’aurai voulu me glisser dans mes 4 m2
J’aurai voulu dire voilà nous y sommes
Et le monde enfin va changer
Quelque chose de meilleur
Dans ce partage du midi
Un glissement de perspective
Une autre manière d’aller de l’avant
Sans regarder en arrière
Mais justement
Car il y a un Mais
Il y a un justement
Et avec ce justement un ajustement
Comme si ces 4 m2 voulait circonscrire ma colère
Mon indignation
4 m2 si sages qu’ils ne disent que l’économie
La perpétuent entre 4 murs invisibles
Ceux d’une main qui l’est tout autant
Une économie pavoisée de vert
Et plus bobo – vélo, boulot, poireau
Un appel comme cautère sur jambe de bois
Mais la jambe reste la même
Et son élan est à peine endigué
Tant et si bien qu’elle portera les mêmes intérêts
Puisque nous sommes dans un pays où tout se résout par l’économie
Grâce à nos paysans
Nos petits commerces
Nos banques
Nos certitudes
Nos indépendants
Nos coiffeurs
Et notre confort
Ils diront c’est un premier pas
Mais il n’y a que le premier pas qui compte
Ils diront c’est un début
Mais dans le début il y a déjà la fin
Car depuis toujours le réformisme a été le dernier rempart du système
Son allié objectif
Celui qui le perpétue dans le velours
Les pétitions, les happenings, les déclarations d’attention sont les attributs inoffensifs de ce consentement masqué qui accroche un sourire d’indulgence aux lèvres de nos décideurs
Bien décidés à ne rien décider
A ne rien changer
Et surtout pas la marche du monde
Surtout pas la pauvreté vraie de celle qui défile pour bénéficier de l’aide alimentaire
Celle qui ne s’appelle pas Martine et n’ira pas « à la ferme »
Surtout pas la situation du migrant qui continuera de prendre le bateau quand nous renoncerons à prendre l’avion
Surtout pas les transactions adossées aux marchés internationaux des armes, des drogues et des esclaves.
Ils s’attendaient à une claque
Et voilà que c’est une caresse
Qui ne rebrousse aucun poil
Ne bouscule aucun dogme
N’interroge jamais notre humanité
Et moi
Qui ne fais rien
Ou si peu
Je ne vaux pas mieux
Dans mes 4 m2
De doute.



